Télé-dépendance

(Ce texte s’inspire d’une chronique de David Servan-Schreber.)

 

C‘est la pause café à l’usine. Je tends l’oreille pour écouter la conversation :

- Je ne peux pas voir en peinture la nouvelle amie de Carter !

- Moi non plus. L’idée qu’ils vont peut-être se marier me donne des frissons.

Et bla bla bla et bla bla bla.

 

Les situations décrites ne sont pas toutes enviables. Je me dis que c’est la vie, que c’est l’essence même de la réalité humaine.

Soudain, je comprends mon erreur. Ce n’est pas de certains de leurs amis dont ils parlent, mais des personnages de la série « Urgences ». Ainsi, ces collègues de travail nourrissent leur vie affective de personnages virtuels. C’est vrai que ces amis virtuels ont un avantage : inutile de les inviter à dîner ni de ranger l’appartement avant qu’ils n’arrivent. Et je suis sûr que vous n’aurez pas de mal de trouver beaucoup d’autres avantages.

 

Mais, si je comprends que dans notre vie surchargée, on choisit « Friends » plutôt que de vrais amis, je pense aussi que chaque heure consacrée à ces mirages est une heure volée à la réalité : à notre partenaire, avec qui nous ne faisons jamais assez l’amour ; à nos enfants, avec qui nous ne construisons jamais assez de châteaux en Espagne ; à nos parents et amis avec qui nous ne dialoguons jamais assez et nous ne jouons jamais assez, à nous-même enfin car nous ne consacrons jamais assez de temps à faire une activité physique et à nous instruire.

 

Pour conclure, savez-vous que parmi les mourants, aucun ne regrette de n’avoir pas assez regardé la télévision. En revanche, beaucoup déplorent ne pas avoir pris assez de temps pour s’occuper des autres.

 

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